Le projet de Karaté Québec
Habituellement, les formations des arbitres en karaté se donnent dans les environs de Montréal et mélangent des arbitres de tous les grades. Pour de nouvelles arbitres, ce contexte où elles sont placées avec de nombreux hommes accumulant souvent plusieurs années d’expérience peut être intimidant. Ainsi, pour stimuler la participation des femmes au rôle d’arbitre dans cette discipline sportive, Chloé Thibault, arbitre très engagée, s’est déplacée à l’Institut de Karaté Shotokan de Sept-Îles (IKSSI), en décembre dernier, dans le but de former de nouveaux et de nouvelles arbitres. Créer une occasion de formation pour les arbitres en région est une initiative porteuse pour recruter davantage de femmes dans ce rôle, voilà pourquoi Égale Action a choisi d’appuyer ce projet de Karaté Québec, dans le cadre de son programme de soutien pour l’avancement des femmes en sport (PSAF).
Utiliser les compétitions comme leviers de formation
C’est la directrice des activités du Dojo de Sept-Îles, Marie-Pier Bernatchez, accompagnée de son conseil d’administration qui a proposé cette idée à la fédération. « Comme une compétition de finale régionale s’organisait déjà chez nous, cela signifiait qu’il y aurait des officiel·les présent·es. J’ai donc saisi l’occasion en me disant que ce serait le parfait moment pour former la relève, » explique Marie-Pier. Au cours des dernières années, l’IKSSI a connu une croissance de 10 % de participation chez les jeunes filles. « Il est très important pour nous que la représentation des femmes dans les autres rôles entourant la pratique du karaté suive cette courbe de croissance aussi, » ajoute la directrice générale de ce dojo de la Côte-Nord.
Défaire les stéréotypes de genre autour des arts martiaux
Plusieurs étiquettes négatives envers les femmes circulent toujours dans les coulisses de nombreuses disciplines sportives et le karaté ne fait pas exception. « Malheureusement, on entend encore trop souvent des phrases soulignant que les filles ne sont pas assez fortes ou qu’elles ne peuvent pas se battre. Je continue donc à faire évoluer le discours autour de moi puisque le karaté est un sport axé sur le développement de soi et la recherche d’équilibre qui peut réellement être bénéfique pour tout le monde. De plus, pratiquer ce sport contribue à l’adhésion à des valeurs de discipline et de respect qui se reflètent dans la vie de nos athlètes peu importe le genre, » partage Mme Bernatchez avec une passion visible.
L’importance des modèles féminins
La présence de Chloé Thibault lors de l’événement de décembre a envoyé un message clair aux femmes de la Côte-Nord voulant s’engager dans le rôle d’arbitre : Il est possible d’aller loin dans ce rôle pour une femme alors faites-vous confiance et lancez-vous ! « C’était la première formation que je donnais où le groupe était presque paritaire, » a confié Chloé qui arbitre depuis vingt-deux ans. Six femmes sont passées à un grade d’arbitrage supérieur dans la cadre de cette fin de semaine de compétition et de formation. Dans les contextes de formation traditionnels, il y a beaucoup d’arbitres qui viennent pour du maintien de compétences plutôt que du développement, ce qui rend les groupes très hétérogènes. « Je crois que le fait d’avoir plusieurs femmes en début de parcours a été un facteur de succès pour cette formation. Il y avait une belle énergie, » a ajouté cette ancienne athlète possédant aujourd’hui sa licence d’arbitrage panaméricaine.
Aller à la rencontre des filles et leur offrir des contextes de pratique en bas âge
« Si je me fie à mon propre parcours, il ne faut pas hésiter à offrir des situations de pratiques d’arbitrage aux plus jeunes. C’est personnellement ce qui a éveillé mon intérêt envers le rôle d’arbitre lorsque j’étais athlète, » affirme Cholé. Durant son parcours étoffé dans le milieu des arts martiaux, Chloé a aussi eu l’occasion de passer ses premiers examens alors qu’elle était encore active comme athlète sur le circuit de compétition. « La notion de cibler les femmes et de leur offrir de participer en allant à leur rencontre est sans aucun doute un ingrédient de succès pour qu’elles soient plus nombreuses à choisir de devenir arbitres, » a aussi précisé celle qui fait partie de la commission d’arbitrage de Karaté Canada. Elle a terminé sur une note qui pourrait inspirer toutes les karatékates à explorer l’arbitrage : « Ce sont les qualités acquises en karaté qui font de bonnes arbitres, pas la performance sur le tapis. C’est dans la fine compréhension de la biomécanique et des connaissances techniques que l’on devient vraiment bonne. Tout est donc dans ce que tu comprends de ton art. » Celles qui sauront miser sur leur discipline, leur concentration, leur prestance et leur capacité à se faire confiance ont donc la porte grande ouverte si elles souhaitent faire le saut en arbitrage.